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Rivista di etica e scienze sociali / Journal of Ethics & Social Sciences

 

Comment interpréter l’enseignement social de Gaudium et spes? Comment le ressaisir quarante ans plus tard pour vivre en pdfhéritiers de l’événement que fut le concile Vatican II pour l’Église et pour le monde? Ces deux questions sont au cœur de notre colloque. L’intuition directrice est ici qu’une réponse purement doctrinale manquerait son objet. Pour comprendre le concile en profondeur, il faut se familia - riser avec un éthos croyant, qui est ce réseau complexe d’évidences et de références, parfois explicites mais pas toujours, ayant servi de matrice à la réflexion morale des acteurs conciliaires. Il convient de restituer, autant que possible, le contexte pratique dans lequel le schéma XIII, puis la Constitution pastorale ont vu le jour. Qu’est - ce qui a conduit les Pères à s’adresser d’un même élan aux chrétiens et à tous les hommes, en organisant leur discours autour d’un formidable appel à s’engager plus avant dans la justice? Notre effort de familiarisation historique, théologique et spirituelle avec une époque révolue n’a pas pour seul enjeu d’aboutir à une compréhension adéquate. Il est aussi la condition de possibilité d’une interprétation engagée, visant à redéployer la puissance d’interpellation morale du concile pour faire face aux défis éthiques que nous découvrons actuellement.

 

Interpréter un document conciliaire

La tâche de l’interprétation conciliaire ne se limite pas à comparer Gaudium et spes aux documents magistériels antérieurs et postérieurs. Il est assurément légitime et même nécessaire de dégager les grandes étapes de l’enseignement social de l’Église, ne serait - ce que pour faire surgir, d’un point de vue historien, les inflexions et les avancées sur fond de continuité1. Il reste que, d’un point de vue ecclésiologique et dogmatique, un document conciliaire possède un statut original au sein de l’enseignement social de l’Église, qui comporte des textes magistériels et des déclarations ecclésiales de nature diverse. En l’espèce, il faut tenir compte de l’orientation pastorale du deuxième concile du Vatican. Elle appelle des distinctions méthodologiques entre l’herméneutique des affirmations doctrinales d’une part, et celle des affirmations pastorales d’autre part, tout particulièrement quand on examine le document d’un genre nouveau qu’est la constitution pastorale2. D’un point de vue épistémologique et systématique, l’interprétation conciliaire doit également tenir compte de la « logique de la situation », dans la mesure où Vatican II traduit la crise que l’Église tente de surmonter face aux questions soulevées par la modernité3: la découverte collective de l’histoire et du pluralisme culturel, l’émancipation des sujets et la globalisation des questions éthiques4 (compétition entre les grandes puissances, guerre et paix, mutation des structures économiques et familiales, faim et pauvreté, etc.). Dans cette ligne herméneutique, l’analyse linguistique des affirmations conciliaires ne suffit plus: il faut la compléter par une étude pragmatique des effets produits par Vatican II sur les rapports entre l’Église et le monde moderne (Wirkungsgeschichte). Malgré l’indéniable fécondité de cette approche, son écueil pourrait être que l’insistance sur les problématiques actuelles conduise à négliger les ressorts du discernement moral et spirituel des acteurs conciliaires. On perdrait alors la trace du jugement qu’ils ont formé, à un moment de l’histoire, sur les enjeux moraux de la foi chrétienne.

Walter Kasper a fait valoir que l’acquiescement intérieur et religieux aux affirmations pastorales du concile s’accompagne d’une « coresponsabilité spirituelle et morale »5. Nous suggérons ici que l’exercice de cette coresponsabilité suppose une familiarisation suffisante avec le travail de responsabilité qui s’est opéré dans l’Église catholique à la faveur de l’événement conciliaire, afin que la responsabilité des baptisés actuels, confrontés à de nouveaux défis, puisse se coordonner à un labeur effectivement commencé dans l’histoire et non à un spectre sorti de l’imagination d’héritiers amnésiques. L’étude de l’histoire de la rédaction de Gaudium et spes appartient donc à la tâche théologique de l’herméneutique conciliaire. Elle n’en est que plus urgente lorsque disparaissent, les uns après les autres, les évêques et les experts engagés à Vatican II. Quand s’estompe le témoignage oral de leur vécu, il reste nécessaire de scruter d’autres sources, parfois plus fiables que la mémoire vive, pour accéder au discernement qu’ils ont engagé, tant au plan de la méthode que des contenus théologiques et moraux. Les acteurs conciliaires se rapportaient d’ailleurs eux - mêmes à un passé qu’il leur fallait interpréter pour produire de nouvelles formulations, non seulement par fidélité à la tradition vivante de l’enseignement doctrinal de l’Église, mais en raison de l’exigence inédite que leur imposait l’axe pastoral du concile. Pour reformuler dans le monde de ce temps l’enseignement social de l’Église que le concile œcuménique aurait pour charge de sanctionner, les rédacteurs s’efforcèrent de ressaisir, en positif et en négatif, la portée morale des pratiques humaines et chrétiennes qu’ils pouvaient observer dans la tranche d’histoire écoulée.

Il convient donc de prendre en compte le creuset ecclésial où l’enseignement conciliaire a pris naissance. Mais comment y parvenir? L’historien et le théologien risquent de se perdre dans un dédale de documents dont l’autorité est variable et qui renvoient à des épisodes difficilement comparables: la consultation préalable du corps épiscopal, l’élaboration des schémas préparatoires, les travaux des commissions officielles ou informelles comportant des experts laïcs et clercs, les consultations privées parfois teintées d’intrigues politiques, l’expression publique et les votes en aula, les règles de fonctionnement du collège épiscopal et les interventions papales. Pour éviter les confusions, il convient de se reporter au texte promulgué et de lui accorder le primat dans l’interprétation. Mais l’accès à l’éthos qui le sous-tend suppose que l’on se familiarise avec des personnes, à commencer par les acteurs principaux de la rédaction, qui ne se contentaient pas de produire des textes doctrinaux et d’amender ceux qui leur étaient soumis. Il leur arrivait de dialoguer et de débattre, de s’envoyer de brefs courriers ou des notes plus substantielles, d’argumenter voire d’insister: au concile, la quête de la vérité passait par tous ces échanges humains, où transparaissaient des convictions théologiques et sociales puisées dans l’Évangile. N’avaient - elles pas poussé certains experts à s’approcher des plus pauvres et à faire route avec eux, avec au cœur la passion de la justice? Interpréter Gaudium et spes, c’est s’attacher à retrouver la trace d’une impulsion éthique née de la foi vécue.

 

Lebret au concile et dans ses engagements sociaux

L’ouverture des archives personnelles de Vatican II donne accès à des documents qui éclairent le rôle des différents rédacteurs, leurs débats d’idées et la formation d’un consensus, mais aussi le type d’engagement intellectuel, social et ecclésial qui fondait leurs prises de position. Dans cette perspective, on mettra ici en lumière l’apport de Louis-Joseph Lebret (1897-1966) à la rédaction de Gaudium et spes. La vie et l’œuvre du Dominicain français ont déjà été analysées à partir d’une étude systématique du fonds Lebret et des archives d’Économie et Humanisme6, de même que sont connus les liens entre Paul VI et Lebret, et leur impact sur l’encyclique Populorum progressio7. Mais les insistances de Lebret méritent d’être rapprochées d’autres acteurs, qui ont été au centre du processus final de la rédaction. L’examen du fonds Pierre Haubtmann8, méthodiquement constitué par l’homme qui coordonna la dernière rédaction, permet de mieux cerner l’influence de Lebret. On verra que celle - ci ne consiste pas tant en une doctrine de la justice qu’en une manière originale d’aborder la question de la justice et de la relier au désir contemporain d’être «plus homme». Lebret était un praticien de l’économie, qui lançait des enquêtes pour impliquer les acteurs concernés et les conduire à l’engagement pour la justice. Malgré sa hantise de traduire l’héritage chrétien dans le nouveau contexte économique, ses intérêts portaient moins sur les théories de la justice que sur ses conditions de possibilité. Son véritable souci était que l’appel à la justice lancé par le concile puisse ébranler le monde contemporain. En se reportant aux publications de Lebret, on voit que cette posture s’enracine dans une expérience spirituelle, qu’il s’efforce de communiquer dans la mouvance d’Économie et humanisme. On gagne ainsi un accès plus personnel et plus concret à l’éthos qui a donné naissance à l’approche conciliaire de la justice.

Comment situer l’apport de Lebret au plan institutionnel? Officiellement nommé expert au concile en mars 1964, il participe activement au travail de la sous - commission qui prépare l’annexe sur la vie économique et sociale9. Il intervient sur des problèmes techniques, notamment sur les mécanismes du sous - développement, comme l’attestent diverses notes dont il est l’auteur10. Son action est manifeste autour de la troisième session conciliaire, notamment par les liens qu’il entretient avec plusieurs évêques du tiers - monde. Mais la maladie le terrasse au printemps 1965, l’empêchant de participer à l’ultime rédaction du chapitre correspondant et de jouer un rôle dans l’arbitrage entre les différents modi. Il est dès lors difficile de mesurer l’influence réelle de Lebret sur l’enseignement conciliaire concernant «la vie économique et sociale»11. En revanche, la troisième session est un moment-clé pour le schéma XIII: les Pères décident que le document s’adressera à tous les hommes, phénomène inédit dans toute l’histoire des conciles. Ce choix entraîne, dans la foulée, le vœu qu’un tableau du monde contemporain permette aux destinataires d’adhérer, dès l’introduction, à l’analyse historique proposée par le concile. La composition de cet exposé introductif est logiquement confiée à Haubtmann, nouveau responsable de la rédaction. Ce dernier s’appuie sur les travaux de la sous –commission signa temporum. Lebret appartient précisément à cette sous – commission, où il collabore étroitement avec François Houtart qui en est le secrétaire. Le Dominicain français participe d’ailleurs à la session d’Ariccia en février 1965, où le texte d’Haubtmann est globalement validé. En somme, la contribution de Lebret à Gaudium et spes se concentre en ce tournant des années 1964-65, lorsqu’il enrichit l’exposé préliminaire de sa vision du monde, de l’action humaine et de la foi. Étant donné le rôle central de cette longue introduction dans la logique d’ensemble de la Constitution pastorale12, l’influence de Lebret sur le texte conciliaire ne s’en trouve nullement minimisée, bien au contraire.

 

L’aspiration à être plus homme et ses fruits de justice

En janvier 1965, le binôme Houtart-Lebret transmet à Haubtmann un document qui lui sert de base pour rédiger son introduction. Y sont analysées les mutations actuelles, vues par les deux auteurs comme le « fruit de la diffusion, en profondeur et en extension, d’une civilisation scientifique et technique »13. Puis sont répertoriées « les conséquences sur les valeurs de l’homme », avant que ne soient dénoncés les multiples « déséquilibres » qui résultent du décalage entre les évolutions techniques et les aménagements économiques, aggravé par les « égoïsmes collectifs ». Comment expliquer que ce sombre tableau ne débouche pas aussitôt sur un vibrant appel à la justice, pour corriger tant de déséquilibres? De fait, la « justice sociale » n’est pas désignée comme une obligation morale, mais comme une aspiration collective déjà présente dans les « luttes parfois violentes des classes ouvrières et paysannes ». Le texte s’achève sur une interrogation « universelle », « d’ordre intellectuel pour les uns et concret pour les autres », qui ne conduit pas à la désespérance, tant elle apparaît porteuse d’un sursaut éthique:

« Face à cette mutation, face aux espoirs et aux potentialités immenses de l’homme d’aujourd’hui, face aux angoi sses, aux points de rupture avec le passé, à la peur de la destruction collective et aux déséquilibres dramatiques de sa condition actuelle, l’humanité s’interroge sur sa propre existence

Plus nettement chez Lebret que chez Houtart, la virtualité morale de ce profond questionnement tient à sa teneur spirituelle, et même religieuse:

« À côté de ceux qui se laissent griser par le savoir scientifique et technique, ou qui se réfugient dans les évasions illusoires, beaucoup d’hommes ressentent le besoin d’adhésion à un absolu qui, pour certains, ne peut être que divin. Ainsi l’humanité, dans les contradictions de sa recherche, n’a peut - être jamais été aussi près d’adhérer au Dieu unique, même quand elle n’est pas débarrassée de ses mythologies fabuleuses, de ses superstitions ancestrales, ou de ses philosophies angoissées.»14

Ce retournement, où les auteurs passent presque sans transition des multiples contradictions du monde contemporain à un optimisme spirituel, est à rapprocher de ce qu’ils regardent comme une aspiration universelle à être « plus homme»:

« L’homme, au confluent de presque tous les systèmes philosophiques, sociaux et politiques actuels, est comme écartelé par des contradictions parfois dramatiques. Le désir d’être plus homme, c’est – à - dire de se réaliser davantage en participant à tous les biens de l’humanité, économiques, sociaux, politiques et culturels, prend une ampleur universelle et mondiale

Les rédacteurs reformulent ainsi l’aspiration universelle au bien commun, pilier de la morale thomiste et vecteur de l’adhésion humaine à la béatitude divine, en l’arrimant à «l’accélération de l’histoire » qui est la nouvelle donne du monde contemporain15. Il est légitime de prêter attention à ce désir d’être « plus homme», car l’expression subsiste en Gaudium et spes pour désigner la morale et sa raison d’être: humaniser la famille des hommes et son histoire (historiam humaniorem reddere, GS 40-3), rendre le monde «plus humain» (vere humaniorem, GS 77,1)16.

 

Dans un monde neuf, il faut miser sur les capacités sociales de l’être humain

Lebret a déjà eu l’occasion de réclamer que le texte conciliaire prenne en compte la nouveauté radicale de l’époque actuelle. Peu avant la troisième session, Pierre Haubtmann, alors secrétaire de la sous - commission 5 qui rédige l’Annexe IV sur « la vie économique et sociale », enregistre les réactions au texte du 2 juin 1964. Celles de Lebret sont éloquentes: « Nécessité de “penser à neuf”, dans une perspective de solidarité et de fraternité. Grande angoisse au fond de la pensée moderne. Pas un “plus avoir”, mais “plus être”, “plus valoir”, “vivre davantage”. Nécessité d’une “éthique internationale” d’inspiration chrétienne. Six milliards en l’an 2000? Alors, famines beaucoup plus aiguës que par le passé. Problème insoluble dans les structures économiques actuelles. » Lebret reproche au texte de « parler en occidental », face au drame des pays du tiers - monde: « Brisure qui se fait dans l’âme entre la civilisation moderne et les traditions — et entre ce que nous apportons comme mentalité rationnelle et leurs traditions.»17.

Pourtant, la gravité des problèmes recensés ne remet pas en cause la capacité fondamentale de l’humanité à s’orienter vers le bien. En cela, Lebret rejoint le diagnostic de Joseph Thomas, membre de la même sous-commission, devant les questions qui hantent l’homme contemporain: « À quoi bon aller de l’avant? Mais vide idéologique: pas de réponses ou de mauvaises réponses. » Le Jésuite français continue, envers et contre tout, de s’adosser aux potentialités morales de l’homme contemporain:

«La doctrine sociale est le rappel des exigences fondamentales qui doivent présider à l’aménagement du monde maintenant que les hommes commencent à pouvoir orienter leurs destins selon leur propres vues, en raison du progrès accompli et des progrès concevables

À nouveau, l’optimisme se fonde sur la foi en une aspiration commune: «La société politique, c’est le vouloir vivre ensemble d’un certain nombre d’hommes. L’homme est social (mais pas que social).» Cet optimiste est partagé par Dom Helder Camara, un familier de Lebret qui relaie souvent ses convictions dans les commissions:

«Pour la première fois dans l’histoire, l’humanité a de réelles possibilités de ressources et de techniques pour créer les conditions de l’exercice effectif de la liberté au niveau de tous les hommes, dans une unité planétaire

Un peu plus loin dans le même manuscrit, Haubtmann relit un courrier de Lebret à Mgr Glorieux où sont exprimés deux regrets: « que l’on ait enlevé les références à l’Écriture qui se trouvaient dans le projet Sigmond18 », « que l’on n’ait pas insisté sur “l’aspiration de l’homme à valoir” et sur la “recherche de Dieu dans les diverses civilisations ». Ces deux remarques soulignent la liberté de Lebret à l’égard de la scolastique tardive, ce qui peut expliquer la suspicion dont il était l’objet chez certains de ses confrères dominicains.19 Il y a pourtant chez lui une tournure authentiquement thomasienne, qui transpose en une autre époque les ingrédients de la scolastique médiévale: un intérêt pour le concret de l’existence morale, la confiance à l’endroit des rationalités émergentes, le recours aux autorités scripturaires et patristiques pour former un discernement moral.20

 

Une relecture théologale de la morale thomiste

Ajoutons que cette méthode puise ses racines dans une théologie spirituelle, qui accompagne l’engagement scientifique et social de Lebret. Son ouvrage Dimensions de la charité21 aide à comprendre que son action, et par suite sa contribution à Gaudium et spes, sont inséparables de ses intuitions théologiques et spirituelles. On y relève une première conviction très thomasienne, à savoir que « l’humanité est toujours mue par quelque amour » susceptible de l’orienter vers Dieu. Lebret reste lucide face à la corruption possible de cet amour, quand l’homme s’attache au mal plutôt qu’au bien, mais l’optimisme pré domine, en raison de la destination ultime de l’être humain.

«Ma rencontre avec tout homme l’enveloppe toujours de tendresse, écrit - il. Avant de voir en lui le corrompu, le déchu, celui qui s’oppose, je vois l’homme, une harmonie de toutes les valeurs naturelles, une puissance indéfinie d’aimer, une capacité potentielle de saisir Dieu22

Le spécifique de l’homme réside, comme chez saint Thomas, en son aspiration à la sociabilité avec autrui et avec Dieu, de telle sorte que ses virtualités éthiques ne sont pas étouffées par les contradictions actuelles. Au contraire, fondamentalement mu par l’amour, l’homme est capable de découvrir le « manque d’amour » dont souffre le monde. L’inquiétude éthique est l’envers d’une vague de fond qui part du concret de nos histoires personnelles, heureusement vulnérables au dynamisme théologal de la charité. « Dès qu’un homme est envahi par la charité et la met en œuvre, l’humanité s’élève. La charité est l’impulsion continue de la montée humaine universelle. »23 Si tout homme peut se laisser toucher par « le problème de la faim des autres », les chrétiens trouvent néanmoins dans l’Écriture de quoi alimenter ce tourment éthique. Paraphrasant la première lettre de Jean, Lebret écrit: « Si j’aime Dieu, je suis pris d’angoisse devant les misères de l’humanité. » Ou encore, sans craindre de faire appel au ressort éthique de la peur, il redéploie la parabole de Lc 16 face à la pauvreté planétaire:

«Lazare est maintenant devenu proche, car, avec les facilités modernes de communications, le monde s’est rétréci. Lazare commence pour nous d’exister. (…) Nous ne l’aimons pas encore, mais il nous fait peur. Lazare a appris à se révolter. (…) Lazare va bientôt devenir 90 % de la population du monde. Lazare apprend à lire et à réagir. Lazare menace notre sécurité, notre paix24

Dès lors, les parents chrétiens ont la responsabilité de « s’informer » correctement sur les « détresses physiques, morales et spirituelles de l’humanité pour que le cœur des enfants et des adolescents en soit très tôt brûlé »25. Par-delà cette topographie des angoisses présentes, il s’agit de convoquer l’intelligence et la sensibilité pour libérer l’impulsion éthique de la charité.

Une fois que la puissance de l’amour est mise en branle, encore lui faut-il trouver l’objet adéquat. D’où la question décisive: dans le monde actuel, sur quelles actions l’amour de Lazare doit - il concrètement déboucher? Là encore, Lebret se montre fidèle à l’intuition de saint Thomas: pas d’amour qui n’épouse les aspirations profondes de l’humanité. Or, il faut bien constater que celles - ci évoluent considérablement dans l’histoire. Il faut donc discerner ce qui change, non pas superficiellement, mais en profondeur, en tenant compte du conflit potentiel entre l’espérance théologale et les espérances séculières, à commencer par celles que génère le marxisme.

«Jamais l’homme n’avait autant qu’aujourd’hui aspiré à plus valoir. (…) Le progrès moderne, le prodigieux essor des techniques, la création de moyens de confort ont tourné l’humanité vers l’espérance d’une vie plus facile, qui apparaît être le plus valoir. Ceci, cependant, n’est qu’une expression de surface d’un désir profond de dépassement. L’homme veut plus savoir, plus réaliser, et finalement être plus. On ne peut expliquer le succès communiste par le seul attrait d’une augmentation de bien-être: une mystique sous-jacente enthousiasme les militants pour l’avènement d’une humanité plus humaine26

Ainsi s’éclaire le sens de l’expression concoctée par le binôme Houtart - Lebret: « le désir d’être plus homme », c’est ce qu’identifie l’interprète du monde contemporain lorsqu’il s’interroge sur la nouvelle donne de l’amour dans la société actuelle, à la lumière de l’Évangile et selon la méthode des signes des temps. Lebret insiste sur « l’aspiration à valoir » qui pousse l’homme à « se réaliser davantage » bien qu’il se sente « comme écartelé » dans les contradictions actuelles27. Dès lors, comme y revient sans cesse le Dominicain, l’action économique en faveur du développement doit renoncer au paternalisme social, pour ne pas faire injure à l’aspiration des plus pauvres à l’autodétermination.

«Le fait d’aimer les autres pour qu’ils soient en Dieu n’exclut pas de les rendre plus hommes. (…) Les aider à grandir de quelque manière que ce soit ne doit jamais chercher à les asservir, à les “posséder”, à les “avoir”. L’amour en Dieu est, de soi, un amour intégral; s’il comprend le vouloir de la croissance de l’autre, il comporte aussi le respect et l’amour de sa liberté28

Si, conformément au discernement des signes de temps, l’injonction morale revient à « rendre l’homme plus homme », le véritable amour doit permettre à autrui de mieux déployer ses propres capacités morales. «Aimer les autres pour qu’ils soient plus hommes, et hommes jusqu’à atteindre Dieu, fait respecter en eux toutes les valeurs et les phases nécessaires de la croissance.»29

Un réseau d’acteurs sensibles à la dimension spirituelle de la justice

Dès lors, on aurait tort de circonscrire l’apport de Lebret à la rédaction de Gaudium et spes dans les limites de ses compétences en matière de développement solidaire, bien qu’il ait souvent été consulté à titre d’expert économique. La manière dont il relisait, avec beaucoup de soin, les projets qui lui étaient soumis atteste que ses intérêts profonds étaient théologiques et spirituels autant qu’économiques. Il ne se priva pas d’amender les textes, même après que la maladie l’eut freiné dans ses activités en 1965. Il suffit de relire les papiers « techniques » dont il était l’auteur et qui circulaient largement au concile, pour se convaincre que ses interventions sur la justice économique étaient lourdes de ses intuitions théologiques. Prenons l’intervention faite à l’ONU, au nom du Saint-Siège, lors du débat sur « Commerce et développement » en avril 196430. Lebret y déclare vouloir « aider, dans un esprit de franche et totale collaboration, à dégager les finalités des échanges internationaux à la lumière des principes de l’éthique internationale et des exigences de l’équité ». C’est pourquoi il envisage les décisions à prendre comme une « première phase » en vue de « l’établissement d’une civilisation authentiquement solidaire ». Dès lors, les obligations de solidarité et de justice sont traitées à la lumière de l’aspiration à valoir et de la possible perversion de cette aspiration en une course effrénée à l’assouvissement de vains désirs. Chez Lebret, la critique du capitalisme sauvage passe moins par une analyse juridique ou économique, que par une approche globale et existentielle, où l’homme est envisagé sous un registre spirituel.

«À regarder les choses de plus près, en termes de valeur humaine, celui qui donne reçoit plus que celui à qui il est donné. La civilisation des privilégiés est menacée par l’extension illimitée de leurs désirs. Elle ne se sauvera qu’en s’engageant dans une voie moins matérialiste et plus humaniste. Selon la justice communautaire, les privilégiés n’ont rien qui ne doive contribuer à l’instauration du bien commun, dans une communauté désormais universelle. Les plus miséreux, en termes de valeur humaine, sont ceux qui ayant beaucoup veulent retenir pour eux-mêmes leur excès d’avoir

Lebret rejoignait sur ce point les intuitions d’autres Français de la sous-commission sur la vie économique et sociale: l’abbé Pierre Haubtmann et le jésuite Joseph Thomas. Le premier, éditeur scientifique des carnets personnels de Pierre - Joseph Proudhon, avait discerné en lui un « antithéiste » plutôt qu’un athée, hanté par la justice et révulsé par une religion oublieuse de ses responsabilités sociales31. Orienté vers Proudhon par Henri de Lubac, Haubtmann était convaincu, comme aumônier national de l’Action catholique ouvrière, de l’urgence qu’il y avait à retrouver la teneur authentiquement spirituelle de certains combats ouvriers pour apurer l’héritage conflictuel entre l’Église et les classes populaires32. Quant à Joseph Thomas, spécialiste de la pensée de Kierkegaard, sa fonction d’aumônier national du Mouvement des Ingénieurs et Cadres de l'Industrie l’avait rendu sensible à l’impact existentiel d’un engagement professionnel dans l’action technique. Plus largement, cet accompagnateur spirituel infatigable s’intéressait aux effets sur l’homme et sur la culture de l’accélération de l'histoire liée au progrès technologique, à la fois plein de promesses et d’inconnues, si bien que « le monde est pris entre la peur et l'espoir»33.

Malgré des trajectoires intellectuelles et pastorales qui les plaçaient aux antipodes du spectre social (tiers - monde, classe ouvrière occidentale, ingénieurs et cadres), ces trois hommes avaient appris à s’apprécier et à collaborer pour faire avancer le texte conciliaire. Ils nourrissaient une conviction commune, à savoir que l’aspiration humaine à la transcendance avait désormais changé de visage, face aux ambivalences du progrès technique et de la globalisation des valeurs. Souvent sécularisée, la quête de Dieu n’avait pourtant pas disparu. Bien plus, le « désir d’être plus homme » et l’aspiration à la justice en devenaient de puissants vecteurs, face à l’anxiété latente. C’est pourquoi ces théologiens œuvrèrent à ce que le texte conciliaire relève le défi posé à la subjectivité contemporaine par la complexité croissante des questions économiques et sociales. Ils surent donner corps à la volonté de dialogue exprimée par les Pères en faisant retentir, au nom de l’Évangile, un appel à aimer au plus intime de chaque être humain, qu’il soit croyant ou non34. Ce faisant, le concile réactivait l’héritage séculaire et pratique de l’humanisme chrétien, tout en s’efforçant de dépasser la scission néfaste entre la foi et la morale sociale. Ces divers éclairages permettent de mieux saisir la profondeur spirituelle de l’appel à la justice contenu dans Gaudium et spes, tonalité qui appartient de plein droit à l’enseignement social de la Constitution pastorale et qui déborde la logique rationnelle et juridique d’une approche de la justice en termes de droit naturel.

Enjeux actuels de l’appel à la justice

Quarante ans plus tard, quels peuvent être les fruits de cette rétrospective historique? Les intuitions de Lebret nous rappellent d’abord que le jugement sur les normes concrètes de justice est indissociable d’un discernement sur les dispositions subjectives qui habilitent nos contemporains à former un tel jugement et à se rendre acteurs de cette justice-là. Qu’en est - il aujourd’hui des désirs fondamentaux propres à soutenir les engagements concrets en faveur de la justice? Le désir d’être « plus homme » suffit-il à caractériser l’époque actuelle? L’aspiration à communiquer davantage, entretenue et stimulée par les technologies contemporaines, semble devenir toujours plus centrale. Reste à préciser comment ces nouvelles caractéristiques du désir humain peuvent alimenter une spiritualité de l’engagement pour la justice, au - delà de l’émotivisme d’une rencontre éphémère entre les personnes ou entre les peuples. Sur ce point, la lucidité qu’avait Lebret face aux ambiguités du désir appelle à mobiliser, encore plus qu’hier, l’héritage des vertus. Entre atonie et hubris, l’être de désir doit apprendre à trouver un juste équilibre, dans un exercice de soi où le sujet affermit sa propre capacité à poursuivre le bien. Mais quels seront les supports sociaux d’un tel apprentissage?

Cette question, devenue brûlante dans les sociétés libérales, dégage de nouveaux défis et de nouvelles tâches pour les communautés chrétiennes. Pour relayer l’appel à la justice, il ne leur suffit plus d’identifier un désir humain sur lequel viendrait s’adosser la proposition évangélique. Le besoin de communication apparaît souvent comme une terrible contrainte, car les individus ne possèdent plus les clés de la rencontre avec autrui dans un monde où les médiations sociales se complexifient. Quelles institutions sauront aider les sujets à déjouer les pièges de la déréalisation d’un corps devenu virtuel, sans craindre les combats qui mènent à une coexistence fraternelle dans la justice? Dans ce nouveau contexte, les pratiques de justice forgées dans les communautés chrétiennes offrent une manière originale de donner corps à un désir nouveau, sans craindre les combats qui mènent à la coexistence fraternelle. Or, ces œuvres de justice sont publiquement rattachées à d’autres pratiques, culturelles et spirituelles, qui se réfèrent à la figure concrète de Jésus de Nazareth et qui engagent le corps de ses disciples. De fait, l’appel à la justice est aujourd’hui, pour certains catéchumènes qui avaient grandi dans un monde sanspdf Dieu et sans rites religieux, un puissant mobile d’adhésion à la foi.

Néanmoins, le lien entre foi et justice mérite d’être approfondi au - delà du seul registre affectif. C’est pourquoi s’impose un décryptage raisonné de l’héritage chrétien, dans la diversité de ses sédimentations historiques. Les sujets croyants y gagnent une meilleure intelligence du désir qui les pousse à communiquer avec autrui et, ce faisant, ils discernent mieux les conversions que suppose la poursuite authentique de cette visée. Les communautés qui soutiennent les sujets dans cette quête morale et spirituelle les instituent pour la justice. Voilà une tâche centrale pour un christianisme héritier de Vatican II, dans un monde qui a beaucoup changé.

 


Note
1 Michel Schooyans, Pour relever les défis du monde moderne. L’enseignement social de l’Église, Préface de René Rémond, Paris, Presses de la Renaissance, 2004 ; Dominique Greiner, « La morale sociale au XXe siècle : une entrée tardive en théologie », in François Bousquet, dir., Les grandes révolutions de la théologie moderne, Paris, Bayard, 2003, pp. 281-308.
2 Walter Kasper, « Le défi de Vatican II qui demeure. À propos de l’herméneutique des affirmations du Concile », in La théologie et l’Église, Paris, Les Éditions du Cerf, 1990, pp. 411-423.
3 Peter Hünermann, « Zu den Kategorien “Konzil” und “Konzilentscheidung” », in Peter Hünermann, Hrsg., Das II. Vatikanum: Christlicher Glaube im Horizont globaler Modernisierung. Einleitungsfragen, Paderborn, Schöningh, 1998, pp. 67-82.
4 Karl Rahner, « Towards a Fundamental Theological Interpretation of Vatican II », Theological Studies, 40/4, December 1979, pp. 716-727; Raphael Gallagher, « The Significance of a Note: The Implications of Gaudium et spes for Fundamental Moral Theology », Studia Moralia, 42, 2004, pp. 451-463.
5 Walter Kasper, art. cit.
6 Denis Pelletier, Économie et Humanisme. De l’utopie communautaire au combat pour le tiers-monde. 1941-1966, Paris, Les Éditions du Cerf, 1996.
7 Paul Poupard, « Le père Lebret, le pape Paul VI et l’encyclique Populorum progressio, vingt ans après », Istituto Paolo VI. Notiziario, 14, mai 1987, pp. 71-84.
8 Anne-Marie Abel et Jean-Pierre Ribaut, Documents pour une histoire du concile Vatican II. Inventaire du Fonds Pierre Haubtmann, Institut Catholique de Paris, 1992.
9 Louis-Joseph Lebret, « La vie économique et sociale et la communauté des nations à promouvoir », in Karl Rahner, Henri de Riedmatten, Marie-Dominique Chenu et alii, "Gaudium et spes". L'Église dans le monde de ce temps. Schéma XIII. Commentaires, Paris, Mame, 1967, pp. 232-278.
10 Notamment : Note demandée par S.E. Mgr Dell’Acqua comme suite à son audience du 28 février 1963, Fonds Pierre Haubtmann n° 1190; Note demandée par S.S. Paul VI pendant l’audience accordée le 28 septembre 1963, Fonds Pierre Haubtmann n 1191; La coopération technique et les aspects sociaux du développement, 25 mars 1964, Fonds Pierre Haubtmann n° 1031; Intervention préparée au nom de la Délégation du Saint-Siège au cours du débat général de la conférence des Nations-Unies sur « Commerce et Développement », Genève, 1er avril 1964, Fonds Pierre Haubtmann n° 1030; Intervention à la Sous-Commission VII. Texte demandé par Mgr Schröffer, 4 février 1965, Fonds Pierre Haubtmann n° 1741.
11 Du reste, la sous-commission 5 résiste souvent à Lebret, dont certains amendements sont rejetés par le secrétaire Pierre Haubtmann, même au printemps 1964 (Fonds Pierre Haubtmann, n°1047). Cela n’empêche pas le Dominicain français de persister dans ses demandes de corrections (Fonds Pierre Haubtmann, n°1053).
12 Philippe Bordeyne, L’homme et son angoisse. La théologie morale de « Gaudium et spes », Paris, Les Éditions du Cerf, coll. Cogitatio fidei n° 240, 2004, p. 192-228.
13 Fonds Pierre Haubtmann, n°1695.
14 Ces deux phrases finales sont des ajouts propres de Lebret au texte de Houtart, comme l’atteste la comparaison entre les pièces 1694 et 1695 du Fonds Pierre Haubtmann. De manière plus sobre, le document de Houtart se terminait ainsi : « Mais l’intensité de la question sur le sens de la vie humaine n’a jamais sans doute été aussi forte et n’a jamais concerné autant d’hommes. »
15 Les corrections de Lebret indiquent deux accents : la rupture instaurée par une « conjoncture » où le changement, devenu « continuel », accroît sans commune mesure les problèmes de « régulation »; les obligations morales qui en découlent, y compris le consentement à modifier les représentations de la paix. Houtart se contentait d’enregistrer l’évolution des mentalités: « Il en résulte une conception dynamique des relations entre l’humanité et le cosmos, qui en écartant l’image d’un temps cyclique élabore les bases d’une vision prospective. » Lebret corrige en faisant de la conversion intellectuelle une obligation proprement morale, qui engage de nouvelles actions collectives: « Il faut en arriver à une conception dynamique des relations entre l’humanité et le cosmos, et des relations entre groupe humains alliés ou antagonistes qui, en écartant l’image d’une paix, tranquillité de l’ordre, devienne l’atténuation et l’harmonisation continue des tensions. À l’ordre établi, et aux routines, du plan local au plan international, succède une période rapidement évolutive qui exigerait, pour rester harmonisée, des projections prospectives coordonnées dans une vision globale des alternatives de l’évolution et des options fondamentales prises par la communauté des peuples. » (Fonds Pierre Haubtmann, n° 1694 et 1695.)
16 L'expression « rendre plus humain » récapitule aussi la vie morale en GS 15,3 (la sagesse) et en GS 53,2 (la culture). Il faut la rapporter à son fondement christologique, « l’Homme Parfait » qui donne au disciple de devenir « lui-même plus homme » (magis homo, GS 41,1). Le P. Chenu emploie la même formule: « En humanisant la nature, l'homme devient plus homme. » (Marie-Dominique Chenu, « Une constitution pastorale de l'Église », Documentation hollandaise du Concile, n°205, 1965, conférence du 22 septembre 1965, p. 5.)
17 Fonds Pierre Haubtmann, n°1051.
18 C’est le schéma dit de Zurich (mars 1964), auquel collaborent Raymond Sigmond et Louis Dingemans, tous deux dominicains et sociologues.
19 Hugues Puel, Économie et Humanisme dans le mouvement de la modernité, Paris, Les Éditions du Cerf, 2004, p. 88.
20 Récapitulant l’essentiel des interventions des Pères conciliaires à l’issue de la troisième session, Lebret déplore à nouveau un appui « insuffisant » sur l’Écriture et sur « l’important apport patristique » (Fonds Pierre Haubtmann, n°1345).
21 Louis-Joseph Lebret, Dimensions de la charité, Paris, Économie et Humanisme/Les Éditions ouvrières, coll. Spiritualité n° 11, 1958.
22 Ibid, p. 36.
23 Ibid, p. 26.
24 Ibid, p. 48.
25 Ibid, p. 62.
26 Ibid, p. 75.
27 Les trois expressions entre guillemets, qui sont propres à Lebret, précisent le sens de la référence au « désir d’être plus homme », sur laquelle les deux rédacteurs s’étaient mis d’accord. Lebret met l’accent sur « l’aspiration à valoir », la préférant au sous-titre « la valeur de l’homme » qu’avait choisi Houtart. Il en admet lucidement l’ambivalence, mais veut éviter qu’on la soupçonne a priori. Le paragraphe de Houtart se terminait ainsi: « Cette valorisation de l’homme aboutit chez certains à une difficulté de comprendre et même à une négation systématique de toute dépendance vis-à-vis d’un Dieu personnel. » Lebret modifie légèrement la phrase et lui en ajoute une autre, ce qui donne: « L’homme veut être, veut exister comme homme, et cette aspiration si légitime aboutit, chez certains, à la difficulté de comprendre toute dépendance vis-à-vis d’un Dieu personnel, et même à sa négation systématique. Ainsi, l’aspiration à valoir, signe positif d’avancée, devient déviation de la recherche d’absolu. » (Fonds Pierre Haubtmann, n° 1694 et 1695.)
28 Dimensions de la charité, p. 67.
29 Ibid, p. 68.
30 Fonds Pierre Haubtmann, n° 1030.
31 Pierre Haubtmann, P.-J. Proudhon. Genèse d’un antithéiste, Tours, Mame, 1969.
32 Pierre Haubtmann, « Actualité de Proudhon », Études, n°249, Avril-Mai-Juin 1946, pp. 37-50.
33 Fonds Pierre Haubtmann, n° 852. Un rapprochement est possible avec l’ouvrage de Tibor Mende: Entre la peur et l'espoir. Réflexions sur l'histoire d'aujourd'hui, Paris, Seuil, 1958.
34 Philippe Bordeyne, « Pierre Haubtmann au Concile Vatican II: Un historien et un théologien de l'inquiétude contemporaine. », Ephemerides Theologicae Lovanienses, 77/4, décembre 2001, p. 356-383. 

 

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